Dans
le Traité des hallucinations, Henri Ey nous guide par un itinéraire
qui va de l'éclosion de l'Hallucination dans les accès aigus
à sa décantation en paroles, puis en idées, comme
résultante d'un travail délirant. Ey parle du travail du
délire comme étant une dialectique qui travaille l'être,
lévénement hallucinatoire et la logique de son monde. Nous
y reconnaissons les mêmes termes utilisés par Alain Badiou
pour aborder les procédures de vérité : la politique,
la science, l'art et l'amour. Ey voit dans le délire une procédure
de vérité dans ce sens précis : un événement
introduit une discontinuité hétérogène qui
engage le sujet dans des procédures d'obstination, de réaction
ou de fidélité. Un tel processus peut donner lieu à
un sujet fidèle, réactif, obscur ou atone. Cependant, Ey
introduit une différence : la procédure de vérité
dans le délire lui semble fausse. Telle fausseté pourrait
se situer dans le fait qu'il ne construit pas un monde sur la scène
du Deux, comme dans l'amour, ni collective, comme dans la politique, mais
il constitue une revanche ultime de l'Un, qui transforme l'Eigenwelt délirante
en un « univers concentrationnaire de solitude ». Et pourtant,
Ey imagine une autre issue : un « processus métapsychotique
», comme dans les paraphrénies, une métamorphose entre
image, parole et idée qui emprunte du "poète et de l'érudit",
où l'on garde la tête dans les nuages mais les pieds sur terre.
Pourquoi
Ey avec Badiou?
Dans les différentes
versions de Paris, Capitale du 19ème siècle, le philosphe
allemand Walter Benjamin imagine pour chacune de ses principales sections,
un contraste entre deux figures, à priori disparates et inégales.
Une méthode critique, qui lui permet de créer tensions
et faire surgir des constellations d'idées. Ce n'est pas par hasard
que c'est dans ce travail que se trouve sa définition de l'image
dialectique. Cependant, telle n'est pas la direction que nous prenons
dans ce travail pour aborder l'hallucination, même s'il nous plaît
de rêver que faire rencontrer Henri Ey avec Alain Badiou soit d'inspiration
benjaminienne. Une rencontre un peu surprenante, qui peut ne pas plaire,
et que pourtant trouve à nos yeux un intérêt majeur
: faire ressortir le versant critique que peuvent projeter sur notre temps
les travaux d'Henri Ey sur l'hallucination.
Prenons départ
dans le livre d'Alain Badiou Logique des mondes, l'être et l'événement
II, où il dit que l'idéologie enveloppante du
siècle est ce qu'il nomme le matérialisme démocratique,
dont un des autres noms possibles et le postmoderne. Un matérialisme
qui fait de la catégorie de vie un axe central et qui valide l'équation
existence
= individu = corps. Un biomatérialisme qui conduit à
une biopolitique qui nous prépare à son tout à
une démocratie sans sujet qui abandonne les individus à l'organisation
en série des identités ou à la confrontation de la
désolation de leurs jouissances, dit Alain Badiou. Il ne nous est
pas difficile d'inclure ici ce que nous pourrions appeler une psychiatrie
sans sujet, qui devient chaque jour plus enveloppante et se prête
d'autant mieux à l'organisation des identités psychiatriques.
C'est le point où nous faisons se rencontrer Henri Ey avec Alain
Badiou. Car le philosophe propose dans son ouvrage une politique de Sujets
et Vérités comme antidote au matérialisme démocratique
des corps et individus. Dans le champ de la psychiatrie, Henri Ey, de façon
anachronique pourrions nous dire, ne propose pas autre chose. Il suffit
de lire ses travaux sur l'hallucination, axe de sa pensée, pour
se rendre compte que la rencontre improbable n'est pas fortuite.
Reprenons les
choses par leur côté clinique. Dans le Traité des
hallucinations, Henri Ey nous guide à travers d'un itinéraire
qui va de l'éclosion de l'Hallucination dans les accès aigus
à sa décantation en paroles, puis en idées, comme
résultat d'un travail délirant. Henri Ey nous parle
du travail du délire comme étant une dialectique qui traverse
l'être,
l'événement hallucinatoire et la logique du monde délirant
qui
se construit. Non sans surprise, nous reconnaissons les mêmes termes
que ceux utilisés par Alain Badiou pour aborder les procédures
de vérité : la politique, la science, l'art et l'amour. Procédures
qui engagent le sujet dans des processus d'obstination, de compromis, de
fidélité. Nous verrons alors que dans le trajet qui va de
l'événement hallucinatoire au délire idéologique
de la paraphrénie, comme le nomme Henri Ey, le psychiatre ébauche
une véritable
politique du sujet délirant dans la
construction de son monde. Nous devons préciser ici que sa manière
dialectique de penser est très proche de celle de l'historien de
l'art allemand Aby Warburg : non pas une pensée de dichotomies et
oppositions, mais de polarités et tensions. C'est ainsi que nous
notons que pour Henri Ey entre Hallucination et Délire il n'existe
pas de discontinuité mais tension polaire, et que ce fait
conditionne la direction des analyses cliniques du deuxième tome
de l'ouvrage auquel nous nous référons ici principalement.
L'événement
hallucinatoire
Alain Badiou nomme
événement ce qui n'a pas lieu d'être. Une rupture
réelle au sein de la multiplicité. En d'autres termes, l'apparition
d'une vérité qui constitue une exception au monde des
opinions, quelque chose qui laisse une trace et qui organise les lieux,
qui prescrit des effets et qu'induit le surgissement d'un sujet propre.
Comme nous pouvons lire dans le Traité, ce sont les mêmes
caractéristiques qu'Henri Ey signale comme propres à l'Hallucination
: irruption effractive et anomique, la Voix qui annonce le délire
et qui surgit comme la trompette du Jugement dernier, un événement
prodigieux et éternel, un phénomène de caractère
hétérogène, un processus en troisième personne
auquel Henri Ey consacre une bonne partie de ses efforts d'élaboration.
Tel événement prescrit aussi des effets au sujet qui l'expérimente.
Effets et destins qui, comme nous le verrons, sont comparables à
ceux qu' Alain Badiou élabore en son oeuvre.
Arrêtons
nous un instant sur ce qu'Henri Ey pense des rapports entre Hallucination
et Délire. Il affirme que, bien que l'on ne puisse pas les confondre
dans une seule notion, ils constituent les deux polarités d'un même
processus. Il le démontre lorsqu'il prête attention aux notions
élaborées par la psychiatrie allemande des débuts
du 20ème siècle, en particulier la Wahnwahrnehmung
(perception délirante), qui englobe hallucination et interprétation
sur le mode d'une tension polaire entre l'une et l'autre. Un des pôles
le constitue l'Hallucination en tant qu'événement et rupture,
de caractère primaire et immotivé, en tout hétérogène
au sujet. Cependant, du fait qu'Henri Ey lie inextricablement le vécu
au pensé et parlé, l'autre pôle sera constitué
par l'idéation et l'incorporation au monde à travers du processus
idéo-affectif qui, comme nous le verrons, peut adopter aussi
le nom de systématisation. C'est à dire la prévalence
de l'idée sur le percept et le sensible, ce qui lui arrive de nommer
idéologie
délirante. Une polarité dialectique, alors, dans laquelle
les formes et les transformations ont une importance cruciale.
Procédures
de Vérité
Reprenons ce qu'Alain
Badiou dit : la vérité de l'événement implique
un sujet. A cet égard, Alain Badiou affirme que le sujet est structure,
mais que le subjectif, l'affirmation de la structure, est plus qu'elle
même. Une dialectique entre le sujet en tant que structure et le
subjectif en tant qu'acte. Une figure qui dit plus que les combinaisons
qui la soutiennent, qui impose au sujet des opérations qu'impliquent
à leur tour des destinées. De son côté,
Henri Ey appelle syntaxe imaginaire le travail délirant
qui
conduit, mais pas nécessairement, de l'événement à
la transformation de l'Hallucination en fiction, et de là à
la construction d'un monde délirant qui suit la trace de
l'événement. Les différentes destinées de la
figure du sujet ne sont autres que les figures cliniques bien connues,
mais considérées classiquement comme des entités séparées.
Et au sein desquelles, les débats sur la présence ou pas
d'hallucinations, et leurs rapports avec le délire, a toujours donné
lieu à des controverses. Ce que Henri Ey soutient avec fermeté,
se reconnaissant en toute une tradition psychiatrique, est que la subjectivation
apellée travail délirant est capable de produire des
transformations dans les figures cliniques, et que dans ce processus les
rapports entre Hallucinations et Délire sont déterminantes.
Dans son aspect
les plus freudien, Henri Ey reconnaît, au sein du processus psychotique,
l'irruption d'une vérité, que ce soit dans la forme la plus
hétérogène de l'Hallucination, ou bien dans l'imagination
commune à tous les hommes. Cependant, cette vérité
lui paraît entachée de fausseté. Il pense, même
si son propre travail nous permet de tempérer cette affirmation,
que la destinée naturelle du délire est l'enfermement dans
un univers concentrationnaire de solitude. En d'autres termes, une
destinée où l'hétérogène, l'irruptif,
serait réduit à une rupture du lien social et où l'Eigenwelt
délirant, le monde propre du délire, ne serait que désolation
et solitude. Ce qui dans les termes d'Alain Badiou se dirait comme une
revanche ultime de l'Un, bien différent de la scène du Deux
de l'amour ou d'autres sites de la vérité comme l'art, la
politique ou la science.
Figures
du sujet
Poursuivant notre
lecture croisée, retournons à l'ouvrage d'Alain Badiou pour
apporter de précisions cliniques. Un rupture dans le monde est supposée
(l'événement), qui laisse une trace et qui induit à
son égard des opérations par le sujet, ce qui, à son
tour, détermine des figures qu'Alain Badiou appelle destinées.
Il distingue ainsi les catégories de la production, la dénégation,
l'effacement et la résurrection. Puis, tels processus peuvent
donner existence à un sujet fidèle, réactif, obscure
ou atone.
Nous voyons une
preuve de la généricité du vrai dans le fait
que nous trouvons dans le Traité des hallucinations les figures
cliniques qui correspondent aux destins du sujet de la vérité
chez Alain Badiou. Et nous pouvons préciser encore que, dans le
Traité, le processus qui détermine les différents
destins cliniques est la relation entre l’Hallucination (comprise comme
événement) et le Délire (compris comme le travail
de syntaxe du sujet et la logique du monde résultante). Dans le
deuxième tome de l’oeuvre d’Henri Ey nous retrouvons cette façon
d’aborder la clinique des dits délires chroniques. Avec une mention
particulière pour l’attention qu’il prête aux transformations
du délire. Il est peut être le seul clinicien qui ait
ainsi repris un des topiques classiques de la psychiatrie du 19ème
siècle, jusqu’à ce que Jean-Claude Maléval lui ait
donné sa version psychanalytique dans l’ouvrage plus récent,
Logique
du délire. Ici même, dans ce congrès, l’exposé
de Dominique Wintrebert sur la paraphrénie, à l’atelier de
l’Association franco-argentine de psychiatrie et de santé mentale,
fournit clarté et précision à ce point de l’histoire
de la psychiatrie.
Signalons le fait
que nous introduisons des changements à l’ordre établi par
Alain Badiou dans son ouvrage pour l’accommoder aux élaborations
cliniques de Henri Ey. Supposons alors un événement
qui laisse une trace et un nouveau corps. Dès lors, l’ensemble des
conséquences possibles de la trace de l’événement
constitue un présent¸ et un présent qui apparaît
comme possible. De cette dialectique surgissent les figures suivantes
:
Le
sujet obscur
Selon Alain Badiou,
face aux conséquences surgies dans le nouveau présent de
l’événement, le sujet obscur procède à leur
occultation et sa tentative d’abolition. La destruction du corps de
l’événement s’accomplit par morcellement, ce qui le réduit
à des simples restes. Prenons l’exemple clinique d’un événement
hallucinatoire qui annonce au sujet une vérité qui le concerne.
Henri Ey expose une figure clinique dans laquelle il existe une mélange
inextricable d’idées délirantes et hallucinations, qui s’expriment
à travers d’énoncés abstraits et quelquefois incohérents,
qui enferment le sujet dans le labyrinthe d’un discours incompréhensible
et parfois néologique. La tension polaire entre hallucination et
délire, c’est-à-dire entre l’événement et la
production d’un monde comme fiction délirante, ne se résout
pas et la vérité demeure invisible et inopérante.
La dissémination de l’événement hallucinatoire oscille
entre la voix et le corps sans que rien ne prenne forme. Nous reconnaissons
ici sans difficultés la figure clinique de la schizophrénie,
dans laquelle il se construit un Eigenwelt qui conduit à
l’univers concentrationnaire de solitude de l’autisme, selon l’expression
du psychiatre. La destruction du corps de l’événement peut
même conduire, dans ses formes terminales graves¸ à
la Verblödung (démence) des auteurs classiques allemands.
Alain Badiou situe le sujet obscur comme paradigmatique du fascisme, mais
nous pensons qu’il est injuste d’étendre cette caractérisation
au sujet obscur clinique, pas que nous ne franchirons pas.
Le
sujet réactif
Pour Alain Badiou,
le sujet réactif est celui qui résiste à la nouveauté
de l'événement, d'où lui vient sa catégorisation
de réactionnaire. La négation est sa principale modalité
de subjectivation : un non à l'événement !
Cependant, selon Alain Badiou, dans cette négation subsiste une
certaine reconnaissance de l'événement. Le présent
se doit d'être moins mauvais que l'événement en tant
que passé. Henri Ey reconnaît dans la figure clinique de la
paranoïa le type même de travail discursif qui produit une falsification
et une inversion de son rapport avec le monde ouvert par l'événement.
Partant de là,
le sujet réactif se consacre à la dite systematisation,
qui fonctionne comme le fer de lance dirigé contre le monde ennemi,
érigé comme obstacle. Ce mouvement possède la faculté
de transformer les moulins à vent en chevaliers ennemis, comme le
dit Henri Ey, qui élargissent jusqu'à l'infini ce que le
sujet perçoit de façon négative comme le signe dramatique
de sa vérité. Alain Badiou, considère que le présent
du sujet es un présent confus qui le déchire entre les conséquences
désastreuses de la production subjective post-événementielle
et son contre-effet raisonnant.
La psychopathologie
nomme processus psychique cet opérateur qui transforme en
idées et dogmes le fait primordial de l'événement,
dont la paternité est attribuée à Karl Jaspers par
Henri Ey. Souvenons-nous qu'Henri Ey fait partie, avec d'autres comme son
ami Jacques Lacan, de ceux qui considèrent le moment fécond
hallucinatoire comme un fait essentiel des délires paranoïaques.
Le
sujet fidèle
Sans doute, le
sujet fidèle est le plus prestigieux aux yeux d'Alain Badiou, le
personnage centrale de son élaboration philosophique. Il lui apparaît
comme celui qui se consacre à la production des conséquences
de l'événement, celui qui engendre une expansion du présent
et qui expose, fragment par fragment, la vérité de l'événement.
Le résultat d'une telle fidélité est un nouveau
présent qui recueille point par point la nouvelle vérité.
Alain Badiou ne se prive pas d'utiliser une terminologie de résonance
théologique pour situer son destin : la résurrection.
De son côté,
Henri Ey reconnaît que le travail délirant puise constituer
une solution à la fracture du monde imposée par l'événement
hallucinatoire. C'est ce qui arrive dans la figure clinique de la paraphrénie,
dont Henri Ey est un des rares psychiatres du XXème siècle
à redorer le blason de l'entité kraepelinienne. Pour lui,
le délire paraphrénique constitue une idéologie,
une mythologie qui conduit à une diplopie du réel et
de l'imaginaire. Là réside sa faculté de pacification
et de neutralisation de la tension polaire. Entre Hallucination et Délire,
dans la paraphrénie, la voix qui annonce le délire et qui
éclate comme la trompette du Jugement dernier, s'évanouit
dans le monde qu'elle fait apparaître comme fiction, et qui se projette
de manière prophétique dans l'avenir ou l'éternité,
dans un monde hors-temps.
Ce processus,
nommé alors métapsychotique par le psychiatre, est
une notion qui lui est propre et qui métamorphose l'hallucination
en fabulation, s'évanouissant ainsi dans le monde qu'elle a fait
apparaître. Une procédure qui a quelque chose du poète
et de l'érudit, où les rapports entre parole, image et idée
trouvent une solution aux antipodes de l'univers concentrationnaire de
la schizophrénie.
Le processus
métapsychotique est, selon Henri Ey, une tension entre représentation
et fiction, entre image et parole. Un processus qui partant de l'expérience
imaginaire se lance vers un travail discursif. Il en résulte une
production hétérogène, irréductible à
toute compréhension - dans le sens précis de Karl Jaspers
-, qui devient une orientation globale de l'existence, soumise éventuellement
à une transformation constante, et qui se confronte à l'infinité
de points fragiles de la réalité pour constituer sa
mondanité. C'est-à-dire ses relations existentielles plus
ou moins permanentes, qui se voient produites par un travail - selon l'expression
su psychiatre français du XIXème siècle -, ce qui
lui permet d'affirmer, encore une fois, que le délire n'est pas
la pure passivité du pathos subi de l'expérience délirante
primaire, mais aussi une activité créatrice. Un travail
de la fonction sur elle-même pour la production du délire
par le délire, dans laquelle le sujet engage sa personne, sans quoi
il n'y a pas de délire, comme Henri Ey le répète avec
insistance. Une vaste fresque poétique dans laquelle on maintient
son esprit dans les nuages mais où l'on conserve les pieds sur terre
et qui peut finir par rompre l'univers de solitude du Eigenwelt
de l'Un pour sortir ainsi du cycle de l'impuissance et la nécéssité
de la psychose.
Le
sujet atone
Finissons nos
propos avec une figure particulière du sujet, un tant excentrée
par rapport à la série établie par Alain Badiou et
aux considérations du Traité d'Henri Ey. Pour Alain
Badiou, le sujet atone est celui qui s'accommode de l'impératif
contemporain vis sans Idée ! Pour ce sujet, l'événement
devient une conception du présent sans tonalité. Nous imaginons
qu'Henri Ey, inspiré par le psychiatre allemand Ludwig Binswanger,
pourrait y reconnaître la position maniaco-dépressive. C'est
un fait du Traité et de l'ensemble de l'oeuvre de Henri Ey,
qu'il cherche toujours à établir un rapport entre ces formes
des dites psychoses aiguës et la construction des délires chroniques.
Toutes ses descriptions montrent que l'Hallucination lui apparaît
comme essentielle dans la mélancolie ou la manie, même si
elles sont volatiles, fugaces, sans que le sujet les prenne au sérieux,
comme s'il s'agissait d'un jeu. Il en va de même avec les fictions
délirantes qui ne finissent jamais de décanter. Avec Ludwig
Binswanger, Henri Ey conçoit l'existence dans la fuite des idées
comme un renoncement au savoir authentique. Rien n'est pris au sérieux.
Il n'existe pas de la part du sujet de travail sur la vérité
dévoilée dans l'expérience de l'événement.
Un flottement neutre dans le tout, une attitude d'insouciance, conduisent
à un vagabondage dans le savoir et le monde qui dissout toute problématique
et qui trompe le patient sur la possibilité d'être heureux
sans désir.
Conclusion
Ce qui nous permet
de conclure nos propos en même temps que nous retournons à
notre point de partie dans la lecture croisée entre le psychiatre
et le philosophe. Puisque tel sujet sans désir est celui qui correspond
au matérialisme démocratique contemporain auquel Alain Badiou
s'oppose. Nous imaginons qu'Henri Ey verrait du même oeil au personnage
sans désir qui est le plus souvent le paradigme de la psychiatrie
sans sujet. Nos auteurs se débattent ainsi avec le même problème
et leurs pensées critiques nous paraissent vitales aujourd'hui.
C'est en tout cas ce que nous proposons à votre discussion.
BIBLIOGRAPHIE
AGAMBEN Giorgio,
La puissance de la pensée, Rivages, 2006.
BADIOU Alain,
Logique des mondes. L'être et l'événement T. II, Seuil,
2006.
BADIOU Alain,
Eloge de l’amour, Flammarion, 2009.
BENJAMIN Walter,
Paris, Capitale du XIXe siècle, Editions Allia, 2003.
EY Henri, Traité
des hallucinations (1973), réed. Crehey, à paraître,
2012.
EY Henri, Leçons
du mercredi sur les délires chroniques et les psychoses paranoïaques,
CREHEY, Perpignan, 2010.
MALEVAL Jean-Claude,
Logique du délire, Masson, 1997.
________________________________________________________________________________________________
LA ALUCINACIÓN
: DEL ACONTECIMIENTO A LA IDEOLOGÍA : EY CON BADIOU
En el Tratado
de las Alucinaciones Henri Ey nos guía por un itinerario que va
de la eclosión de la Alucinación en los accesos agudos a
su decantación en palabra y de allí a ideas, como resultado
de un trabajo delirante. Ey habla del trabajo del delirio como una dialéctica
que trabaja el ser, el acontecimiento alucinatorio y la lógica de
su mundo. Reconocemos los mismo términos que utiliza Alain Badiou
para abordar los procedimientos de la verdad : la política, la ciencia,
el arte y el amor. Ey reconoce en el delirio un procedimiento de la verdad
en ese mismo sentido : un evento introduce una discontinuidad heterogénea
que compromete al sujeto en procesos de obstinación, de compromiso,
de fidelidad. Dicho proceso puede dar existencia a un sujeto fiel, reactivo,
oscuro o átono. Sin embargo, Ey hace una distinción : el
procedimiento de la verdad en el delirio le parece falso. Tal falsedad
podría situarse en el hecho que no construye un mundo en la escena
del Dos, como el amor, ni colectiva, constituyendo una última revancha
del Uno, que torna el Eigenwelt délirante en un « universo
concentrationario de soledad ». Sin embargo, Ey imagina otra solución
: un « proceso metapsicótico », como en las parafrenias,
una metamorfosis entre imagen, palabra e idea que toma "del poeta y del
erudito", en el que se guarda los pies en la tierra y la cabeza en las
nubes.
¿Porqué
Ey con Badiou?
En sus diferentes
versiones de París, Capital del siglo 19, el filósofo alemán
Walter Benjamin imagina para cada una de sus principales secciones un contraste
entre dos figuras, a priori disparates y desiguales. Un método crítico,
que le permite crear tensiones y hacer surgir constelaciones de ideas.
No en vano en dicho trabajo se encuentra su definición de la imagen
dialéctica, que podría también ser un forma interesante
de abordar la alucinación. No es la dirección que tomamos
en este trabajo, aunque nos gusta suponer que el hecho de hacer frecuentar
Henri Ey con el filósofo francés Alain Badiou sea de inspiración
benjaminiana. Un encuentro un tanto sorprendente, que puede no gustar y
que sin embargo tiene a nuestros ojos un interés mayor : resaltar
la vertiente crítica que proyectan los trabajos de Henri Ey sobre
la alucinación en nuestro actualidad.
Tomemos inicio
en el libro de Alain Badiou Lógica de los mundos, el ser y el acontecimiento
II, en el cual nos dice que la ideología envolvente del siglo es
lo que llama materialismo democrático, uno de cuyos nombres posibles
es lo postmoderno. Un materialismo que hace de la categoría de vida
un eje central, y que valida la ecuación existencia = individuo
= cuerpo. Un biomaterialismo, según su expresión, que conduce
a una biopolítica que nos prepara una democracia sin sujeto y que
abandona los individuos a la organización en serie de las identidades
o a la confrontación de la desolación de su goce. No nos
cuesta mucho incorporar aquí lo que podríamos llamar una
psiquiatría sin sujeto que se torna cada vez más envolvente
y se presta tanto mejor a la organización en serie de las identidades.
Este es el punto en el que provocamos el encuentro entre Henri Ey y Alain
Badiou. Puesto que el filósofo propone en su obra una política
de Sujetos y Verdad como antídoto al materialismo democrático
de cuerpos e individuos. En el campo de la psiquiatría, Henri Ey,
de modo anacrónico, no propone otra cosa diferente. Basta con leer
sus trabajos sobre la Alucinación, eje conductor de su pensamiento,
para darse cuenta que el encuentro improbable no es fortuito.
Retomemos las
cosas por su lado clínico. En el Tratado de las Alucinaciones Henri
Ey nos guía por un itinerario que va de la eclosión de la
Alucinación en los accesos agudos a su decantación en palabra
y de allí a ideas, como resultado de un trabajo delirante. Ey habla
del trabajo del delirio como una dialéctica que trabaja el ser,
el acontecimiento alucinatorio y la lógica del mundo delirante que
se construye. No sin sorpresa reconocemos que los términos utilizados
son los mismos de los que se sirve Alain Badiou para abordar los procedimientos
de la verdad : la política, la ciencia, el arte y el amor, y que
comprometen al sujeto en procesos de obstinación, de compromiso,
de fidelidad. Veremos entonces que en el trayecto que va del acontecimiento
alucinatorio al delirio ideológico de la parafrenia, como lo llama
Henri Ey, el psiquiatra esboza una verdadera política del sujeto
delirante en la construcción de su mundo. Debemos precisar aquí
que su modo de pensar dialéctico es muy cercano al del historiador
del arte alemán Aby Warburg: es decir, no tanto un pensamiento de
dicotomías y oposiciones, sino de polaridades y tensiones. Es así
que notamos que, para Henri Ey, entre Alucinación y Delirio no existe
discontinuidad sino tensión polar, y que tal hecho dicta la dirección
de sus análisis clínicos en el segundo tomo de la obra a
la que nos referimos aquí principalmente.
El Acontecimiento
alucinatorio
Alain Badiou llama
acontecimiento a aquello que no tiene lugar de ser. Una ruptura real en
el seno de la multiplicidad. En otros términos, la aparición
de una verdad que constituye una excepción al mundo de las opiniones,
algo que deja una traza y organiza los lugares, que prescribe efectos y
que induce un sujeto propio a ella misma. Como se puede leer en el Tratado,
son las mismas caracterísicas que Henri Ey indica como propias a
la Alucinación : irrupcion efractiva y anómica (fuera de
la ley), la Voz que anuncia el delirio y que surge como la trompeta del
Juicio final, un acontecimiento prodigioso y eterno, un fenómeno
de carácter heterogéneo, un proceso en tercera persona, al
que Henri Ey le dedica buena parte de sus esfuerzos de elaboración.
Dicho acontecimiento también prescribe efectos al sujeto que lo
experimenta. Efectos y destinos que, como veremos, son homogéneos
a los que Alain Badiou elabora en su obra.
Detengámosnos
un instante sobre lo que Henri Ey piensa de las relaciones entre Alucinación
y Delirio. El afirma que, si bien no pueden confundirse en una sola noción,
constituyen en cambio dos polaridades del mismo proceso. Así lo
muestra cuando presta atención a las nociones elaboradas por la
psiquiatría alemana de principios del siglo 20, en particular la
Wahnwahrnehmung (percepción delirante), que engloba alucinación
e interpretación sobre el modo de una tensión polar entre
una y otra. Uno de los polos es la Alucinación como acontecimiento
y ruptura, de carácter primario e inmotivado, en todo heterogénea
al sujeto. Sin embargo, como para Henri Ey el proceso psicótico
liga inextricablemente lo vivido a lo pensado y hablado, el otro polo lo
va a constituir lo ideado e incorporado al mundo a través del proceso
ideo-afectivo que, como veremos, puede adoptar también el nombre
de sistematización. Es decir la prevalencia de la idea sobre el
percepto y lo sensible, lo que le acontece llamar ideología delirante.
Polaridad dialéctica entonces, en las cuales las formas y transformaciones
son de vital importancia.
Procedimientos de
la Verdad
Retomemos lo dicho
por Alain Badiou: la verdad del acontecimiento implica un sujeto. A tal
respecto, Alain Badiou afirma que el sujeto es estructura, pero que lo
subjetivo, la afirmación de la estructura, es más que la
estructura. Una dialéctica entre el sujeto como estructura y lo
subjetivo como acto. Una figura que dice más que las combinaciones
que lo sostienen, que impone al sujeto operaciones que implican destinos.
Henri Ey, por su lado, va a llamar sintaxis imaginaria al trabajo delirante
que conduce, aunque no necesariamente, del acontecimiento a la transformación
de la Alucinación en ficción, y de allí a la construcción
del mundo delirante que sigue la marca o la traza del acontecimiento. Los
diferentes destinos de la figura del sujeto no son mas que figuras clínicas
conocidas, aunque clásicamente consideradas como entidades separadas.
Y en las cuales las discusiones sobre la existencia o no de alucinaciones,
y sus relaciones con el delirio siempre han dado lugar a controversias.
Lo que Henri Ey sostiene con firmeza, reconociéndose en toda una
tradición psiquiátrica, es que la subjetivación llamada
trabajo delirante es capaz de producir transformaciones en las figuras
clínicas, y que en dicho proceso las relaciones entre Alucinación
y Delirio son determinantes.
En su aspecto
más freudiano, Henri Ey reconoce en el seno del proceso psicótico
la irrupción de una verdad, ya sea en su forma más heterogénea
de la Alucinación, o bien de la imaginación común
a todos los hombres. Sin embargo, esta verdad le parece marcada de falsedad.
El piensa, aunque su trabajo mismo nos permita reducir la fuerza de tal
afirmación, que el destino natural del delirio sea el encierro en
un universo concentracionario de soledad. Dicho de otro modo, un destino
en que lo heterogéneo, lo irruptivo, quedaría reducido a
una ruptura del lazo social, y en el que el Eigenwelt delirante, el mundo
propio del delirio, sería sólo desolación y soledad.
Lo que en términos de Alain Badiou sería una última
revancha del Uno, bien distinto de la escena del Dos del amor o de otros
sitios de la verdad como el arte, la política o la ciencia.
Figuras del sujeto
Continuando nuestra
lectura cruzada, retornemos al trabajo de Alain Badiou para brindar precisiones
clínicas. Se supone una ruptura en el mundo (el acontecimiento)
que deja una marca o traza, que induce operaciones a su respecto por el
sujeto, lo que a su vez determinan figuras que Alain Badiou llama destinos.
Distingue así las categorías de la producción, la
denegación, el ocultamiento y la resurrección. Dicho proceso
puede dar existencia a su vez a un sujeto fiel, reactivo, oscuro o atono.
Pensamos que es
una prueba de la genericidad de lo verdadero, según la expresión
de Alain Badiou, el hecho que podamos encontrar en el Tratado de las Alucinaciones
las figuras clínicas correspondientes a los destinos del sujeto
de la verdad de Alain Badiou. Y podemos precisar aún que, en el
Tratado, el proceso que determina los diferentes destinos clínicos
es la relación entre Alucinación (entendida como acontecimiento),
y el Delirio (entendido como trabajo de la sintaxis del sujeto y la lógica
del mundo delirante que resulta de ello). En el segundo tomo de la obra
de Henri Ey encontramos esta forma de abordar la clínica psiquiátrica
de los llamados delirios crónicos. Con una mención particular
a la atención que Henri Ey porta a las transformaciones del delirio,
quizás el único clínico que haya llamado la atención
sobre lo que fuera uno de los tópicos clásicos de la psiquiatría
del siglo XIX, hasta que el psicoanalista francés Jean-Claude Maleval
le haya dado su versión psicoanalítica más reciente
en el libro Lógica del delirio. En este mismo congreso, la ponencia
de Dominique Wintrebert sobre La parafrenia, en el atelier de la Association
franco-argentine de psychiatrie, aporta claridad y precisión
a este punto de la historia de la psiquiatría.
Advirtamos que
alteramos aquí el orden establecido por Alain Badiou en su obra
para adecuarlo a las elaboraciones clínicas de Henri Ey. Supongamos
entonces un acontecimiento que deja una traza o marca y un nuevo cuerpo.
Asimismo, el conjunto de consecuencias posibles de la traza o marca del
acontecimiento constituye un presente, y un presente que aparece como posible.
De esta dialéctica surgen las siguientes figuras.
El sujeto oscuro
De acuerdo a Alain
Badiou, frente a las consecuencias surgidas del nuevo presente del acontecimiento,
el sujeto oscuro procede a su ocultamiento y a su tentativa de abolición.
La destrucción del cuerpo del acontecimiento procede por despedazamiento,
lo que lo reduce a meros restos. Tomemos el ejemplo clínico de un
acontecimiento alucinatorio que anuncia al sujeto una verdad que lo concierne.
Henri Ey expone una figura clínica en la cual existe una mezcla
inextricable de ideas delirantes y alucinaciones, las que se expresan a
través de enunciados abstractos y algunas veces incoherentes, y
que encierran al sujeto en el laberinto de un discurso incomprensible y
algunas veces neológico. La tensión polar entre alucinación
y delirio, es decir entre el acontecimiento y la producción de un
mundo como ficción delirante, no se resuelve y la verdad permanece
invisible e inoperante. La diseminación del acontecimiento alucinatorio
oscila entre la voz y el cuerpo sin que nada tome forma. Su proceso esencial
es la destrucción. Reconocemos aquí sin dificultad la figura
clínica de la esquizofrenia, en la cual se construye un Eigenwelt
que conduce al universo concentracionario de la soledad del autismo, como
se expresa el psiquiatra francés. La destrucción del cuerpo
del acontecimiento puede incluso conducir, en las formas terminales graves,
a la Verblödung (demencia) de los autores clásicos alemanes.
Alain Badiou refiere el sujeto oscuro como paradigmático del fascismo,
pero pensamos que sería injusto hacer extensiva dicha caracterización
al sujeto oscuro clínico, y nos abstenemos aquí de franquear
dicho paso.
El sujeto reactivo
Para Alain Badiou,
el sujeto reactivo es aquel que resiste a la novedad acontecimiento, de
donde proviene su categorización de reaccionario. La negación
es su principal modo de subjetivación : un no al acontecimiento!
Sin embargo, de acuerdo a Alain Badiou, un cierto modo de reconocimiento
del acontecimiento subsiste en la negación. El presente debe ser
menos malo que el acontecimiento como pasado. Henri Ey reconoce en la figura
clínica del paranoico el prototipo de trabajo discursivo que produce
una falsificación e inversión de su relación con el
mundo abierto por el acontecimiento.
Partiendo de allí,
el sujeto reactivo se consagra a la llamada sistematización, que
funciona como la vanguardia (fer de lance) dirigida contra el mundo enemigo
erigido como obstáculo. Dicho movimiento posee la facultad de transformar
los molinos de viento en caballeros enemigos, dice Henri Ey, que amplían
hasta el infinito lo que el sujeto percibe, de modo negativo, como el signo
dramático de su verdad. Alain Badiou, considera que el presente
del sujeto es un presente confuso que lo desgarra entre las consecuencias
desastrosas de la producción subjetiva post-acontecimiento
y su contra efecto razonante.
La psicopatología
nombra proceso psíquico, cuya autoría Henri Ey reconoce al
psiquiatra alemán Karl Jaspers, al operador que transforma el hecho
primordial del acontecimiento alucinatorio en ideas y dogmas. Recordemos
que Henri Ey forma parte, junto a otros como su amigo Jacques Lacan, de
aquellos que consideran como un hecho esencial de los delirios paranoicos
el momento fecundo alucinatorio.
El sujeto fiel
Sin lugar a dudas,
el sujeto fiel es el que tiene más prestigio en el pensamiento de
Alain Badiou, el personaje central de su digresión filosófica.
Le aparece como aquel que se consacra a la producción de las consecuencias
del acontecimiento, y cuya actividad explora lo que ha acontecido, engendra
una expansión del presente y expone fragmento por fragmento la verdad
del acontecimiento. El resultado de tal fidelidad es un nuevo presente
que recoge punto por punto la nueva verdad. Alain Badiou no se priva de
utilizar una terminología de resonancia teológica para situar
su destino : la resurrección.
Por su parte,
Henri Ey reconoce que el trabajo delirante pueda constituir una solución
a la fractura del mundo impuesta por el acontecimiento alucinatorio. Tal
cosa ocurre en la figura clínica de la parafrenia, de la cual Henri
Ey es uno de los pocos psiquiatras del siglo XX a redorar el blasón
de la entidad kraepeliniana. Para él, el delirio parafrénico
constituye una ideología, una mitología que conduce a una
diplopía de lo real y lo imaginario. Allí reside su facultad
de pacificación y de neutralización de la tensión.
En la polaridad entre Alucinación y deliro, en la parafrenia, la
voz que anuncia el delirio y que destella como la trompeta del Juicio final,
se desvanece en el mundo que hace aparecer como ficción, la que
se proyecta proféticamente en el porvenir o la eternidad, en un
mundo fuera del tiempo.
Tal proceso, llamado
entonces por el psiquiatra metapsicótico, una noción que
le es propia, metamorfosea la alucinación en fabulación y
se desvanece así en el mundo que ha hecho aparecer. Un procedimiento
que tiene algo del poeta y del erudito, y en el cual las relaciones entre
palabra, imagen e idea encuentran una solución a las antípodas
del universo concentracionario de la esquizofrenia.
El proceso metapsicótico
es, según Henri Ey, una tensión entre representación
y ficción, entre imagen y palabra, y que partiendo de la experiencia
imaginaria se lanza hacia un trabajo discursivo. Lo que de ello resulta
es una producción heterogénea, irreductible a toda comprensión
- en el sentido que le da Karl Jaspers -, que se torna una orientación
global de la existencia, sometida eventualmente a una transformación
constante y que se enfrenta a la infinidad de puntos frágiles de
la realidad para constituir su mundanidad. Tal mundanidad, es decir sus
relaciones existenciales más o menos permanentes, se ven producidas
por un trabajo que, retomando la expresión del psiquiatra francés
del siglo XIX Lasègue, le permite afirmar una vez más que
el delirio no es la pura pasividad del pathos sufrido de la experiencia
delirante primaria, sino también actividad creadora. Un trabajo
de la función sobre ella misma, para la producción del delirio
por el delirio, y en el cual el sujeto compromete su persona, sin lo cual
no hay delirio, como Henri Ey lo afirma con insistencia. Un vasto fresco
poético en el cual se mantiene su espíritu en las nubes pero
se guardan los pies sobre la tierra y que puede terminar por romper el
universo de soledad del Eigenwelt del Uno y salir así del ciclo
de la impotencia y la necesidad de la psicosis.
El sujeto atono
Terminemos nuestros
propósitos con una figura particular del sujeto, un tanto exterior
a la serie establecida por Alain Badiou y de las consideraciones
del Tratado de Henri Ey. Para Alain Badiou, el sujeto atono es aquél
que se acomoda del imperativo contemporáneo : vive sin Idea! Para
tal sujeto, el acontecimiento se trona en una concepción sin tonalidad
del presente. Imaginamos que Henri Ey, inspirado por el psiquiatra alemán
Ludwig Binswanger, reconocería aquí la posición maníaco-depresiva.
Es un hecho del Tratado y de toda la obra de Henri Ey, que siempre busca
establecer la relación entre estas formas de las llamadas psicosis
agudas y la construcción de los delirios crónicos. Todas
sus descripciones muestran que la Alucinacion le parece esencial en la
melancolía o la manía, aunque sean volátiles, fugaces
y sin que el sujeto las tome en serio, como si fuese un juego. Lo
mismo ocurre con las ficciones delirantes que no terminan nunca de decantarse.
Henri Ey, junto a Ludwig Binswanger, conciben la existencia en la fuga
de ideas como un renunciamiento al saber auténtico. Nada es tomado
en serio. No existe un trabajo por parte del sujeto sobre la verdad surgida
en la experiencia del acontecimiento. Un flotamiento neutro en el todo,
una actitud de despreocupación que conduce a un vagabundeo del saber
y del mundo que disuelve toda problemática y que engaña al
paciente sobre la posibilidad de ser feliz sin deseo.
Conclusión
Esto último
nos permite terminar nuestro desarrollo, al mismo tiempo que retornamos
a nuestro punto de partida en la lectura cruzada entre el psiquiatra y
el filósofo. Ya que tal sujeto sin deseo es el que corresponde mejor
al materialismo democrático contemporáneo contra el que se
opone Alain Badiou. Imaginamos que Henri Ey vería con los mismos
ojos al personaje sin deseo que es a menudo el paradigma de la psiquiatría
sin sujeto. Nuestros autores se cruzan con el mismo problema y sus pensamientos
críticos nos parecen esenciales hoy. Es en todo caso lo que proponemos
para discusión.
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